Le fond de page a été réalisé avec une Croix du Sud (parmi la vingtaine) qui est le talisman d'une ville ou d'un lieu remarquable du pays touareg.

 

Les Targui sont l'un des groupes de tribus berbères nomadisant de part et d'autre du tropique du Cancer entre l'Atlantique et la Mer Rouge. Leur territoire couvre le sud-ouest de l'Algérie, le sud-est de la Lybie et le nord du Mali et du Niger. Leur influence s'étend aux confins de ce territoire sur les grands marchés du Sud comme Agadès ou de l'Est comme Ghat. Leur principale activité est l'élevage auquel s'ajoute, pour certaines tribus, l'extraction du sel. Mais, leur réputation est avant tout celle de guerriers redoutés qui ont pratiqué jusqu'au début du XX° les rezzou et péages.

Leur armement comprenait une épée droite à deux tranchants et garde simple (Takouba, Takooba, Takuba), un poignard de bras (Telek), un bouclier en peau d'antilope et une lance d'environ 2 mètres (Allarh). Beaucoup plus rarement, un sabre à légère courbure (Alguinjar).

La Takouba appartient à un groupe d'armes typiquement africaines, tout comme la Kaskara de la partie ouest du Soudan, sans écarter de possibles influences hispaniques par les Almoravides du XI° (Nicolaisen 1997) ou arabes (Spring 1993).

LA LAME

¤ Provenance:

C'est une lame large et droite à deux tranchants et d'une longueur comprise entre 74 et 84 cm. Sa forme va en s'amincissant de la garde à la pointe ordinairement arrondie. Les tranchants, surtout vers la pointe, sont souvent rendus irréguliers par les affutages successifs laissant des stries grossières sur 0,5 à 1 cm. Les 20 à 30 cm. sous la garde sont en principe sans tranchant.

¤ Gorges:

Habituellement, les lames de production locale ont trois gorges étroites partant de la garde: une centrale courant jusqu'à la pointe, encadrée par deux plus courtes. Parfois, on trouve jusqu'à cinq gorges étroites et courtes ou une seule gorge large et courte (largeur du quart ou tiers de la lame). Quant aux lames d'importation ou provenant de rezzou, elles pouvaient avoir des gorges différentes en fonction des forges.

¤ Marques de forge:

  • en haut: Lame de production locale à 3 gorges forgées et à marques identifiables.

  • en bas: Lame de production locale à 3 gorges gravées au ciseau et à marques très simplifiées.

  • en haut: Lame arabe à large gorge avec l'étoile de Suleiman.

  • en bas: sur l'autre face, un carré à 4 cases contenant des chiffres (symbôles talismaniques des épées islamiques) et une sorte de croix surmontée d'un cercle (suggérant la Croix et le Globe, symboles souvent gravés sur les épées allemandes du XVI° - Briggs 1965).

 

LA POIGNEE

Elle se compose d'une garde simple, d'une poignée formée d'une feuille de métal enroulée et d'un pommeau. La soie passe dans la poignée où elle est calée (soit par 2 plaques de bois dur, soit par 2 feuilles de métal enroulées) et est rivetée au pommeau.

¤ Le type du Sud avec une garde large et un pommeau épais de forme ronde ou ovoïde.

à gauche: garde formée de 2 plaques de fer pincées par 2 rivets autour de la lame, puis, brasée au cuivre gravé de dessins géométriques. Le pommeau, en forme de noix du Brésil, est en fer brasé au cuivre. La poignée est couverte d'un cuir.

à droite: garde formée d'une cage en fer soudée, brasée au cuivre et gravée et poinçonnée de motifs géométriques. Le pommeau est formé d'un disque en fer surmonté d'une pyramide de bandes de cuivre. La poignée est brasée au cuivre.

¤ Le type du Centre a un pommeau formé de 2 pyramides inversées en fer dont la supérieure est garnie de bandes alternées de cuivre jaune et rouge.

Ces 3 exemples ne se différencient que par la décoration de motifs géométriques traditionnels sur cuir, métal blanc et cuivre rouge et jaune repoussés

 

LE FOURREAU

Souple, il est formé de plusieurs couches de cuir renforcées par des nerfs. Le cuir de surface (en dromadaire ou en chèvre) est teinté en brun-rouge et est repoussé de motifs géométriques traditionnels. Il est parfois agrémenté de plaques d'argent ou de cuivre elles aussi décorées. Enfin, 2 anneaux de bélière permettent son port (à l'horizontale) à la ceinture.

 
 
 
 
 
 
ETUDE DE 2 TAKOUBA

Elles faisaient partie des prises de guerre entreposées par l'Armée française au Fortin de Bab Jdid ("Porte Nouvelle" ou du sud) à la prise d'Alger en 1830 et récupérées en 1961.

Takouba aux croissants de lune (en haut)

¤ Poignée de type Sahara Sud recouverte de cuir noir avec pommeau en forme de noix du Brésil et garde en 2 plaques pincées par rivets. La garde et le pommeau ont conservé des traces de brasure au cuivre qui devait à l'origine les recouvrir complètement et être gravée de motifs traditionnels.

¤ Lame en acier trempé à 3 gorges forgées naissant sous la garde et dont la centrale courre jusqu'à 12 cm. de la pointe. Larges traces d'aiguisages grossiers à partir de 20 cm. sous la garde et jusqu'à la pointe. L'état est très bon (peu de points de rouille) et la forge de qualité avec une grande netteté des gorges.

¤ Marques de forge (2 demi-lunes opposées) très nettes et bien formées sur chaque face (à 18 cm. sous la garde).
¤ Longueur totale 98 cm. / lame de 84 cm. de longueur et de 4,5 cm. de largeur à la garde.
¤ Datation estimée: cette Takouba était dans un état identique en 1830, c'est-à-dire ayant déjà perdu la quasi-totalité de la brasure de décoration au cuivre. On peut estimer que l'ensemble a été monté dans la seconde partie du XVIII°. La lame est de production soudanaise.
 
Takouba au dessin (en bas)

¤ Poignée de type Sahara Sud avec pommeau composé d'un disque et d'un dôme soudés. Cette poignée en fer était sans doute recouverte de cuir à l'origine. La garde est formée d'une cage soudée en fer . Là encore, elle a conservé des traces de brasure au cuivre qui devait à l'origine la recouvrir complètement et être décorée.

¤ Lame à 1 gorge centrale large courrant jusqu'à la pointe ....très arrondie et sans doute cassée. Si la gorge se terminait comme à sa naissance (côté garde), il devrait manquer environ 10 cm. Cette lame, longue et de largeur presque constante, est très souple et nerveuse. Un éclat sur l'une des faces laisse apparaître dessous un métal sombre différent de celui très fin de la surface.

¤ Longueur totale actuelle 94 cm. (sans doute, 104 cm. à l'origine) / lame de 81 cm. (91 cm.) / largeur 4 cm. à la garde et 3,2 cm. à la pointe.


¤ Pas de marque de forge, sinon 5 caractères indéchiffrables sur une face sous la garde. Sur chaque face, fine gravure de 18 cm. en 2 parties: l'une de 3 rosaces dynamiques inscrites dans un rectangle et l'autre d'une composition florale (voir ci-dessous).

¤ Datation et provenance:
Poignée: comme pour la première Takouba, son état est celui de 1830, c'est-à-dire ayant déjà perdu la quasi-totalité de la brasure de décoration au cuivre. Elle est d'une facture ancienne (XVII° - XVIII°).

Lame: Allez sur "Topic LAME" pour la synthèse des recherches sur le forum:

 

 


BIBLIOGRAPHIE

  • Lee A. Jones 'Takouba, swords of the Saharan Tuareg' (vikingsword.com)

  • Federica de Cesco 'Touareg, nomades du Sahara' - Hachette

  • Charles Brouty 'Suites de dessins Touareg'- Préface de Frison-Roche (Carbonnel - Alger 1957)

  • Briggs, Lloyd Cabot, "European Blades in Tuareg Swords and Daggers," The Journal of the Arms & Armour Society [U.K.] Vol. V. No. 2. (1965)

  • Nicolaisen, Johannes and Nicolaisen, Ida., The Pastoral Tuareg: Ecology, Culture, and Society (New York: Thames and Hudson, 1997).

  • Spring, Christopher, African Arms and Armour, (London: British Museum Press, 1993).

  • Spring, Christopher, "African Hilt Weapons," in Swords and Hilt Weapons (New York: Weidenfeld & Nicolson, 1989).

  • Morel M.H. "Essai sur l'épée des Touareg de l'Ahaggar" (2 - pages 121-168 (1943) ) et "Notes sur les Takoubas historiques" (5 - pages 231-235 (1948)) dans Travaux de l'Institut de Recherches Sahariennes.

  • Gast M. "Epée, Takouba" - Musée du Bardo - Collections ethnographiques - Touareg Ahaggar - (Paris AMG -1959 - pages 10 et 11).

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